Au début de l'an 2000, la constitution d'un gouvernement autrichien incluant des ministres d'un parti populiste de droite aux caractéristiques extrémistes allait susciter une commotion démocratique, non seulement dans le pays mais également à travers l'Europe.
Les réactions vives des autres États européens paraissaient alors révélatrices de la gravité de la transgression. Cependant, depuis lors, d'autres coalitions gouvernementales transgressant les mêmes interdits démocratiques ont accédé au pouvoir dans plusieurs États européens, sans provoquer ne serait-ce que l'esquisse d'une réaction européenne.
Le caractère unique de cette «affaire autrichienne» est ainsi révélateur du défaut d'une culture politique européenne. Les scènes politiques en Europe sont encore largement nationales et les réflexes démocratiques divergent sensiblement d'un pays à un autre. Dans le même temps, le projet d'intégration européenne affecte et affaiblit les débats démocratiques nationaux, alors que l'Europe en chantier n'est pas encore parvenue à générer un véritable espace politique commun à même de constituer un lieu de légitimation.
Cet ouvrage examine un épisode récent de l'histoire européenne comme le révélateur de cette double crise des cultures politiques nationales, autrichienne en l'espèce, et européenne.